Ella porte le verre à ses lèvres, et ferme les yeux d'un même mouvement. L'air autour d'elle est chaud et compact, elle étouffe un brin, mais son visage ne laisse rien paraître. Un sourire béat flotte sur ses lèvres tandis qu'elle dodeline doucement du bout du nez. Ses pensées sont fixées sur un univers à dix milles lieues de là, et rien ne la distrait dans sa rêverie, pas les gens s'exécutant sur la scène, pas les mouches d'hommes qui voltigent autour d'elle, zieutant ses jambes dénudées dans ses petits shorts en jeans. Elle voguait sur une eau pailletée de mauve et d'étoiles lorsque le mouvement répétitif de porter son verre à ses lèvres puis le laisser en suspens à quelques centimètres de sa bouche entrouverte s'interrompit. Ouvrant à peine les yeux, Ella constata que son verre était bien vide, et descendit de son haut tabouret, où assise en indien, elle trônait sur un coin de la salle, pour se faufiler jusqu'au bar. Elle eut à peine le temps d'esquisser un geste de la main qu'un grand brun, exactement comme elle les aime, exactement comme elle les choisi, se dessina devant elle. « Si ce n'est pas l'homme de ma vie ! » Les dents blanches perçant la peau abimée par le soleil de ses lèvres, Ella penche la tête avec coquetterie et bat des cils.