 | Sujet: Les mots du ciel - MAE. Mer 25 Fév - 15:59 | |
| Stern, aujourd'hui, il avait changé d'endroit. Il en avait marre d'être tout le temps dans les mêmes rues, toutes identiques ou presque, en plein centre ville. Il avait eu envie de marcher parce qu'il avait fait beau alors il était venu jusque-là. C'était pas le même monde, qui se baladait ici. Y'avait beaucoup de jeunes, beaucoup de gens bronzés, beaucoup d'enfants. Il faisait moins gris que dans le centre, ça faisait joli. Stern, il s'était assis sur un petit mur qui délimitait la rue de pavés de la zone de sable. S'il se penchait trop en arrière, il tombait bas, en contrebas, dans le sable salé. Alors il restait bien installé dans la position du tailleur, son petit gobelet de pièces à côté de lui, et disait ses mots dans l'obscurité naissante d'un début de nuit tiède.
« Le pré est vénéneux mais joli en automne Les vaches y paissant Lentement s'empoisonnent Le colchique couleur de cerne et de lilas Y fleurit tes yeux sont comme cette fleur-la Violâtres comme leur cerne et comme cet automne Et ma vie pour tes yeux lentement s'empoisonne ». Il avait la voix calme, pour une fois, Stern. Il faisait plus de grands gestes avec ses bras, il essayait plus d'intéresser les gens, peut-être qu'y avait plus grand monde qui passait, peut-être qu'il était fatigué aussi, mais il y pensait pas. Il était en train de fumer une cigarette qu'on lui avait donnée mais surtout, il la regardait, il la regardait se consumer, et sentait la fumée piquer sa gorge à certains mots plutôt qu'à d'autres. C'était beau, la fumée, qu'il se disait, c'était beau comme une poésie, aussi. Puis, dans le gris brumeux, alors qu'il allait reprendre les vers d'Apollinaire, il vit Mae, Mae qu'il reconnaissait sans avoir besoin de le voir, Mae qui l'avait fait dormir dans son canapé, Mae qui était beau mais ça, il lui avait déjà dit. Il vit Mae alors il sourit, cria « Mae. » mais tout doucement, et tant pis pour Apollinaire, Mae, même juste le prénom, c'était aussi tout un poème. |
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